La crise amène-t-elle à porter un nouveau regard sur les Directions des Systèmes d’Information ?

Si, comme le révèle l’enquête « Et maintenant ? » réalisée par MAESTRIUM pendant le confinement, de nombreux responsables de la fonction Systèmes d’Information affirment que la crise sanitaire et ses conséquences ont fortement mis en lumière leurs actions et leurs projets, ce coup d’accélérateur semble surtout avoir bénéficié aux usages numériques. Le pic de la crise aura-t-il permis un renouvellement profond du regard porté sur la fonction, ou est-on d’ores et déjà revenu au « business as usual » ?

 

Un constat fait l’unanimité : avec le confinement, en plein cœur de la crise, les systèmes d’information (SI) ont constitué la condition sine qua non de la continuité d’activité pour une majorité de structures. En toute logique, cette situation a constitué un défi d’ampleur pour la fonction. Christophe MANGHOLZ, consultant et manager de transition, spécialisé dans les systèmes d’information, le souligne : « Il a fallu maintenir le fonctionnement de l’entreprise avec les collaborateurs à domicile. Pour les SI, cela a consisté à tout adapter en un temps record pour que les salariés puissent travailler ensemble, bien que physiquement séparés. C’était un défi inhabituel. » Avec, face à cette épreuve du feu, des niveaux de préparation, de réactivité ou de robustesse inégaux. Et, bien sûr, des enjeux différents selon le taux d’activité à assurer et les contraintes à assumer. Pour les SI, cette étape a également été un moyen d’éprouver l’efficience de l’ensemble des briques : hébergement, équipement, équipe, prestataires. « Une grande victoire s’est située dans la fiabilité des opérateurs. Cela a représenté un test extraordinaire », souligne par ailleurs Christophe MANGHOLZ.

 

Une prise de conscience en demi-teinte

Selon lui, la période n’aura pas nécessairement rimé avec une prise de conscience aigue des dirigeants concernant l’importance des projets SI. En revanche, il reconnaît que la question de la sécurisation des systèmes a été au cœur des débats. Impossible d’utiliser les ordinateurs personnels ou alors dans certaines conditions exclusivement. Les équipes informatiques ont jonglé avec les FireWall, les VPN… Le caractère essentiel de la sécurité a ainsi été largement diffusé auprès des collaborateurs. Cependant, Christophe MANGHOLZ doute que de gros investissements soient à venir sur ces sujets au sein des PME, même s’il estime que les dirigeants en ont aujourd’hui une conscience plus affûtée. D’autres experts, à l’instar de Jan HANDGRAAF, DSI de transition pour MAESTRIUM, sont persuadés que cette crise aura un impact sur le schéma directeur de certaines entreprises. Ce dernier pourrait être revu en intégrant davantage la dimension digitale, dans la mesure où celle-ci peut contribuer à réduire les coûts, simplifier les process. Tous deux s’accordent néanmoins sur un point : les entreprises qui ont souffert de leur dépendance aux procédures papier vont accélérer leur dématérialisation. La numérisation des factures, imposée par la loi à l’horizon 2023, devrait ainsi prendre de la vitesse.

 

Une accélération inédite des usages, l’émergence de nouveaux besoins

Désormais, tous les collaborateurs des entreprises savent utiliser un, voire plusieurs outils de visioconférence. Chacun sait mieux partager l’information, les données. Sur ce point, la bascule avant/après est indiscutable : la transformation culturelle est largement entamée, l’autonomie est acquise et de nombreux freins sont tombés. Christophe MANGHOLZ le confirme : « Sur le plan de l’acculturation, le phénomène a été puissant, sans conteste. Il y a désormais une facilité, un réflexe. Cependant, cela a engendré un autre besoin, celui de la gestion documentaire. En effet, ce nouveau mode massif et individuel de partage d’informations et de données nécessite une organisation, une structuration. Il y a ainsi une Gestion électronique de la documentation (GED) à mettre en place, afin que l’information soit accessible à tous les collaborateurs concernés, facilement. D’autant que de nombreuses entreprises ont accepté le principe d’instaurer le travail à domicile. Cela sera donc un chantier incontournable. » Un autre effet de bord se fait jour, concernant cette fois-ci l’usage des mails. « La période a encore accentué l’utilisation intensive des mails. Or, cela peut constituer un vrai sujet car les collaborateurs passent du temps à écrire, lire, répondre, classer. En outre, on s’aperçoit que cette culture mail ralentit la prise de décision. ». La solution est-elle à chercher du côté des plateformes collaboratives à messageries intégrées, tels Slack, Trello et autres ? Là encore, Christophe MANGHOLZ se veut prudent : « D’une part, ces outils collaboratifs ne remplacent pas le partage en face à face et, d’autre part, ils sont difficilement adoptés en remplacement du mail. Finalement, en-dehors des équipes et fonctions déjà habituées à travailler en mode projet, ces plateformes ne sont pas encore entrées dans les mœurs. »

 

Dans l’immédiat, les projets de grande ampleur en stand-by

Même si la crise a pu renforcer le DSI dans sa fonction et créer un niveau d’écoute et de confiance renforcé, comme l’estime Pascal VAN BRABANT, Directeur des Systèmes d’Information, même si son image est devenue celle du « facilitateur », comme en témoigne Thierry HARO, également Directeur des Systèmes d’Information, les prochains temps ne devraient pas révolutionner l’approche de la fonction en entreprise. Comme l’explique Christophe MANGHOLZ, « il faut bien être conscient qu’aujourd’hui, la plupart des entreprises font le dos rond et essayent de sécuriser au maximum pour aborder la reprise. La crise est loin d’être derrière nous. Pour beaucoup d’entreprises, il faut survivre, et force est de constater que les grands projets de transformation, côté SI, sont à l’arrêt. De la même manière, les grandes réflexions ne sont pas encore à l’ordre du jour, quand bien même elles seraient tout à fait pertinentes, par exemple pour se demander comment capitaliser sur ce qui a eu lieu et exploiter au mieux les outils digitaux. » Aujourd’hui, l’urgence est donc de faire avec les systèmes à disposition. En attendant ce nouveau souffle, les SI peuvent néanmoins compter sur cet éclairage soudain, qui leur apportera certainement des arguments clés lorsqu’il s’agira de porter de futurs projets.

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